Quelle est la part du charbon dans la production d’électricité en france ?

La production d'électricité en France a connu de profonds changements au fil des décennies, avec une évolution marquée des sources d'énergie utilisées. Alors que le charbon a longtemps été un pilier de la production électrique, son rôle s'est considérablement réduit ces dernières années. Cette transition énergétique soulève des questions cruciales sur la sécurité d'approvisionnement, l'impact environnemental et les défis techniques à relever. Comprendre la place actuelle du charbon dans le mix électrique français permet de mieux appréhender les enjeux de la transition vers des énergies plus propres et les stratégies mises en œuvre pour assurer une production électrique fiable et durable.

État actuel de la production électrique au charbon en france

Aujourd'hui, la part du charbon dans la production d'électricité en France est extrêmement faible. En 2024, les centrales à charbon n'ont représenté que 0,13% de la production électrique nationale, soit environ 725 GWh. Cette proportion minime témoigne d'un déclin spectaculaire de l'utilisation du charbon dans le mix énergétique français au cours des dernières années.

Actuellement, seules deux centrales à charbon restent opérationnelles en France métropolitaine : celle de Cordemais en Loire-Atlantique et celle de Saint-Avold en Moselle. Ces centrales ne sont utilisées qu'en dernier recours, principalement pour répondre aux pics de consommation lors des périodes de grand froid ou en cas de tension sur le réseau électrique.

Il est important de noter que cette faible utilisation du charbon dans la production d'électricité place la France parmi les pays européens les moins dépendants de cette source d'énergie fossile. Cette situation contraste fortement avec celle d'autres pays comme l'Allemagne ou la Pologne, où le charbon continue de jouer un rôle significatif dans la production électrique.

Historique et évolution de l'utilisation du charbon dans le mix énergétique français

L'histoire du charbon en France est intimement liée au développement industriel du pays. Dès le XIXe siècle, le charbon a été le moteur de la révolution industrielle, alimentant les usines, les chemins de fer et les premières centrales électriques. Les bassins miniers du Nord-Pas-de-Calais, de la Lorraine et de la Loire ont été au cœur de cette exploitation intensive.

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, l'industrie charbonnière française employait encore près de 300 000 personnes. Cependant, à partir des années 1960, le déclin s'est amorcé. Plusieurs facteurs ont contribué à cette évolution :

  • L'épuisement progressif des gisements facilement exploitables
  • La concurrence du pétrole et du gaz naturel, moins chers et plus faciles à transporter
  • Le développement du programme nucléaire français à partir des années 1970
  • La prise de conscience croissante des enjeux environnementaux liés aux émissions de CO2

En 1994, le Pacte charbonnier a été signé, marquant le début de la fin programmée de l'exploitation du charbon en France. Ce pacte prévoyait notamment des mesures sociales pour accompagner la fermeture progressive des mines. La dernière mine de charbon française a fermé ses portes en avril 2004 à Creutzwald, en Moselle, mettant fin à trois siècles d'exploitation minière dans le pays.

Depuis lors, la part du charbon dans la production d'électricité n'a cessé de diminuer. Si en 2016, le charbon représentait encore environ 1,4% de la production électrique française, ce chiffre est tombé à moins de 0,2% en 2024. Cette évolution rapide témoigne de la volonté politique de sortir du charbon et de la transition énergétique en cours.

Centrales à charbon encore opérationnelles : cordemais et Saint-Avold

Bien que la France ait considérablement réduit sa dépendance au charbon, deux centrales thermiques utilisant ce combustible restent en activité sur le territoire métropolitain : la centrale de Cordemais en Loire-Atlantique et celle de Saint-Avold en Moselle. Ces installations, initialement vouées à la fermeture, ont vu leur durée de vie prolongée jusqu'en 2027 pour des raisons de sécurité d'approvisionnement électrique.

Caractéristiques techniques de la centrale de cordemais

La centrale thermique de Cordemais, exploitée par EDF, est située près de Nantes. Elle comprend deux unités de production au charbon d'une capacité de 600 MW chacune. Cette centrale joue un rôle crucial dans l'approvisionnement électrique de la région Bretagne, qui ne dispose pas de centrale nucléaire sur son territoire.

Les caractéristiques principales de la centrale de Cordemais sont :

  • Puissance installée totale : 1 200 MW
  • Technologie : chaudières à charbon pulvérisé
  • Mise en service : 1970 pour l'unité 4, 1976 pour l'unité 5
  • Consommation annuelle de charbon : environ 1,5 million de tonnes (avant la réduction de son utilisation)

La centrale de Cordemais est équipée de systèmes de traitement des fumées pour réduire ses émissions polluantes, notamment des filtres à manches pour capter les poussières et des installations de désulfuration et de dénitrification des fumées.

Fonctionnement et production de la centrale de Saint-Avold

La centrale Émile-Huchet de Saint-Avold, exploitée par GazelEnergie (filiale du groupe tchèque EPH), dispose d'une unité de production au charbon d'une puissance de 618 MW. Cette centrale, située dans l'ancienne région minière de Lorraine, a une histoire particulière :

  • Mise en service initiale : 1981
  • Fermeture prévue : mars 2022
  • Réouverture : hiver 2022-2023 dans le contexte de la crise énergétique
  • Fonctionnement actuel : limité aux périodes de forte demande électrique

La centrale de Saint-Avold est capable de produire jusqu'à 15 millions de kWh par jour lorsqu'elle fonctionne à pleine capacité. Cependant, son utilisation est désormais restreinte aux situations de tension sur le réseau électrique, principalement durant les pics de consommation hivernaux.

Projets de reconversion et modernisation des sites

Face à l'objectif de sortie du charbon, les exploitants des centrales de Cordemais et Saint-Avold travaillent sur des projets de reconversion :

Pour Cordemais, EDF avait initialement envisagé un projet de conversion à la biomasse, baptisé Ecocombust . Ce projet visait à utiliser des pellets de déchets de bois comme combustible. Bien que ce projet ait été abandonné pour des raisons économiques, un nouveau projet de conversion a été relancé en 2023 en partenariat avec Paprec. Cependant, en septembre 2024, EDF a annoncé une fermeture sèche de la centrale, proposant à la place un site de production de tuyauteries pour ses nouveaux réacteurs EPR2.

À Saint-Avold, GazelEnergie a d'abord annoncé un projet de production de chaleur renouvelable à partir de biomasse et un autre de production d'hydrogène vert. Plus récemment, c'est une conversion au gaz qui a été proposée et autorisée par le Parlement en avril 2025.

Ces projets de reconversion soulèvent des questions sur la viabilité économique et environnementale des alternatives proposées, ainsi que sur leur compatibilité avec les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Impact environnemental et émissions de CO2 des centrales à charbon françaises

Bien que la part du charbon dans la production d'électricité en France soit désormais minime, l'impact environnemental des centrales à charbon reste un sujet de préoccupation. Les centrales thermiques au charbon sont connues pour être parmi les sources d'énergie les plus émettrices de CO2 et d'autres polluants atmosphériques.

En 2024, les émissions de CO2 liées à la production d'électricité à partir du charbon en France étaient estimées à environ 600 000 tonnes. Ce chiffre, bien que relativement faible comparé aux émissions totales du secteur énergétique français, reste significatif compte tenu de la faible production électrique associée.

Les centrales à charbon émettent en moyenne :

  • 1 058 g de CO2 par kWh produit
  • Des particules fines (PM10 et PM2.5)
  • Des oxydes d'azote (NOx)
  • Du dioxyde de soufre (SO2)

Ces émissions ont des impacts sur la qualité de l'air local et contribuent au changement climatique global. La fermeture programmée des dernières centrales à charbon françaises s'inscrit donc dans une démarche de réduction des émissions de gaz à effet de serre et d'amélioration de la qualité de l'air.

L'utilisation du charbon pour la production d'électricité, même à faible échelle, reste incompatible avec les objectifs climatiques à long terme de la France.

Comparaison avec d'autres sources d'énergie dans le mix électrique français

Le mix électrique français se distingue par sa faible dépendance aux énergies fossiles, dont le charbon. Cette situation est le résultat d'une politique énergétique axée sur le nucléaire et, plus récemment, sur le développement des énergies renouvelables.

Part du nucléaire dans la production d'électricité

Le nucléaire est de loin la principale source d'électricité en France. En 2024, il représentait environ 64,2% de la production électrique nationale. Cette prépondérance du nucléaire s'explique par le choix stratégique fait dans les années 1970 de développer un parc de centrales nucléaires pour assurer l'indépendance énergétique du pays.

Les avantages du nucléaire incluent :

  • Une production d'électricité stable et pilotable
  • De faibles émissions de CO2 en phase d'exploitation
  • Une indépendance vis-à-vis des fluctuations des prix des combustibles fossiles

Cependant, le nucléaire soulève également des questions liées à la gestion des déchets radioactifs et à la sûreté des installations.

Croissance des énergies renouvelables : éolien et solaire

Les énergies renouvelables connaissent une croissance soutenue dans le mix électrique français. En 2024, l'éolien et le solaire représentaient respectivement 9,9% et 4,3% de la production d'électricité. Cette progression s'inscrit dans le cadre des objectifs nationaux et européens de transition énergétique.

L'éolien et le solaire présentent plusieurs avantages :

  • Des sources d'énergie inépuisables et propres
  • Une réduction de la dépendance aux énergies fossiles
  • Une production décentralisée qui contribue à la résilience du réseau

Néanmoins, ces énergies posent des défis en termes d'intermittence et de stockage de l'électricité produite.

Rôle des centrales hydroélectriques

L'hydroélectricité joue un rôle important dans le mix électrique français, représentant 11,5% de la production en 2024. Les barrages hydroélectriques offrent plusieurs avantages :

  • Une production d'énergie renouvelable et pilotable
  • Une capacité de stockage d'énergie via les stations de transfert d'énergie par pompage (STEP)
  • Une contribution à la gestion des ressources en eau et à la prévention des inondations

L'hydroélectricité constitue ainsi un complément précieux aux autres sources d'énergie renouvelable, notamment pour la gestion de l'intermittence.

Utilisation du gaz naturel comme alternative au charbon

Le gaz naturel représente une part modeste mais non négligeable du mix électrique français, avec environ 5,9% de la production en 2024. Les centrales à gaz, plus flexibles que les centrales à charbon, sont souvent utilisées pour répondre aux pics de demande et compenser l'intermittence des énergies renouvelables.

Les avantages du gaz naturel par rapport au charbon incluent :

  • Des émissions de CO2 réduites de moitié par rapport au charbon
  • Une plus grande flexibilité de production
  • Des coûts d'investissement moins élevés que pour les centrales à charbon

Cependant, le gaz naturel reste une énergie fossile émettrice de gaz à effet de serre, et son utilisation à long terme est questionnée dans le cadre des objectifs de neutralité carbone.

Perspectives d'avenir et objectifs de sortie du charbon en france

La France s'est engagée dans une politique ambitieuse de sortie du charbon, s'inscrivant dans le cadre plus large de sa stratégie de transition énergétique et de lutte contre le changement climatique.

Plan climat et engagement de fermeture des centrales à charbon

Le gouvernement français a initialement fixé l'objectif de fermer toutes les centrales à charbon d'ici 2022. Cette ambition s'inscrivait dans le cadre du Plan Climat adopté en 2017, visant à accélérer la transition vers une économie bas-carbone.

Cependant, face aux difficultés techniques et à la nécessité d'assurer la sécurité d'approvisionnement électrique, cet objectif a été repoussé à 2027 pour les dernières centrales de Cordemais et Saint-Avold. Cette décision souligne la complexité de la transition énergétique et la nécessité d'une approche pragmatique.

Malgré ce report, la France maintient son engagement à long terme pour une sortie totale du charbon. Les objectifs actualisés prévoient :

  • Une réduction drastique de l'utilisation du charbon, limitée aux situations d'urgence
  • Le développement accéléré des énergies renouvelables pour compenser la fermeture des centrales à charbon
  • L'amélioration de l'efficacité énergétique pour réduire la demande globale d'électricité

Défis techniques et économiques de la transition énergétique

La sortie du charbon s'accompagne de nombreux défis techniques et économiques que la France doit relever :

  • Gestion de l'intermittence des énergies renouvelables : Le remplacement des centrales à charbon par des sources d'énergie intermittentes comme l'éolien et le solaire nécessite des solutions de stockage et de gestion du réseau plus avancées.
  • Modernisation du réseau électrique : L'intégration massive d'énergies renouvelables requiert une adaptation et un renforcement des infrastructures de transport et de distribution d'électricité.
  • Reconversion des sites et des emplois : La fermeture des centrales à charbon implique la nécessité de reconvertir les sites industriels et de former les travailleurs à de nouveaux métiers.
  • Coûts d'investissement : La transition vers des énergies plus propres nécessite des investissements importants, tant dans les nouvelles capacités de production que dans les infrastructures de réseau.

Ces défis soulignent l'importance d'une planification minutieuse et d'une approche globale de la transition énergétique, prenant en compte non seulement les aspects environnementaux mais aussi les implications sociales et économiques.

Stratégies de remplacement et sécurité d'approvisionnement électrique

Pour assurer la sécurité d'approvisionnement électrique tout en réduisant la dépendance au charbon, la France met en œuvre plusieurs stratégies :

  1. Développement des énergies renouvelables :
    • Augmentation de la capacité éolienne, avec un objectif de 35 GW installés d'ici 2028
    • Accélération du déploiement du solaire photovoltaïque, visant 40 GW de capacité en 2028
    • Exploration du potentiel de l'éolien offshore, avec plusieurs projets en cours de développement
  2. Optimisation du parc nucléaire :
    • Prolongation de la durée de vie des centrales existantes, sous réserve de l'accord de l'Autorité de Sûreté Nucléaire
    • Construction de nouveaux réacteurs EPR2 pour maintenir une base stable de production bas-carbone
  3. Renforcement des interconnexions :
    • Développement des liaisons électriques avec les pays voisins pour faciliter les échanges d'électricité et améliorer la flexibilité du réseau
  4. Stockage de l'énergie :
    • Investissement dans les technologies de stockage, notamment les batteries et l'hydrogène, pour gérer l'intermittence des renouvelables
  5. Efficacité énergétique :
    • Mise en place de programmes d'économies d'énergie dans tous les secteurs pour réduire la demande globale d'électricité

Ces stratégies visent à créer un mix énergétique diversifié et résilient, capable de répondre à la demande électrique tout en minimisant l'impact environnemental. La réussite de cette transition dépendra de la capacité à coordonner ces différentes approches et à adapter les politiques en fonction des évolutions technologiques et des besoins du réseau.

La sortie du charbon en France s'inscrit dans une transformation profonde du système électrique, nécessitant une approche multidimensionnelle et adaptative pour garantir un approvisionnement sûr, propre et abordable.

En conclusion, bien que la part du charbon dans la production d'électricité en France soit désormais marginale, son élimination complète reste un défi complexe. La transition vers un mix électrique sans charbon nécessite une combinaison d'innovations technologiques, d'investissements stratégiques et de politiques adaptatives. Le succès de cette transition sera crucial non seulement pour atteindre les objectifs climatiques de la France, mais aussi pour positionner le pays comme un leader dans la lutte contre le changement climatique et la transition énergétique à l'échelle mondiale.

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